Je n'aimais pas la manière de conduire d'Enzo. Moi qui déjà, n'arrivait pas à contenir mes larmes d'envahir mes joues à l'idée qu'un de mes frères se trouvaient à l'hôpital. Et cette vitesse folle à laquelle roulait mon frère roulait, ça me faisais complètement paniquer. Et si c'était les trois Ersley qui se retrouvaient tout bonnement à l'hôpital pour cause d'un accident de route ? Lorsque Enzo grilla un stop pour la quatrième fois environ depuis que j'étais embarquée dans sa voiture, je ne pus m'empêcher de scander. Il y avait assez de Jude à l'hôpital pour une raison qui m'était encore inconnue, Enzo devait ralentir.

[color=deeppink]« PUTAIN RALENTI ! »

Et j'étais partie dans un autre sanglot incontrôlable. Je n'avais aucune idée de ce à quoi je devais m'attendre une fois à l'hôpital, et je devais avouer que j'avais une peur effroyable de ce qui m'attendais, une fois arrivée devant cette bâtise à l'origine de nombreux cauchemars. J'avais toujours détester les hôpitaux, cet endroit si froid, si lugubre. Je n'y étais aucunement à l'aise. Et puis généralement, une fois à l'hôpital, tu n'y ais pas pour une bonne nouvelle. Et j'avais cet immense pressentiment que ce que j'allais apprendre une fois dans cet bâtise que je déteste ne serait particulièrement joyeux, au contraire. Je n'avais aucune notion pour me dire si Enzo avait ralenti ou non, trop occupée à tenter de me calmer, à me concentrer sur ma respiration et à faire arrêter les larmes qui innondaient déjà mes joues. Je ne savais même pas ce que Jude avait, et déjà je me faisais un sang d'encre. Une fois arrivée, c'est pratiquement Enzo qui me transporta jusqu'à la chambre de Jude, me tenant par la main et me forçant presque à avancer. Qu'est-ce qui m'attendait ? J'en avais pas la moindre idée, et j'en étais qu'un peu plus effrayée. Et puis j'avais croisé Brittany. Son regard vide, son chandail déchirée, des taches de sang sur ses épaules. Ce n'était pas bon, pas bon du tout. Je me mordis la lèvre alors qu'elle me serrait dans ses bras.

« Jude ne va pas bien. Du tout »

Je me décollais de son étreinte, forçant toujours les larmes à rester dans mes yeux. Si je devais voir Jude, si je devais savoir ce qui se passe, je ne devais pas pleurer. Je ne devais pas montrer faible.

« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »

Je sentais Enzo derrière moi, tout aussi intrigué par ce qui allait passé à travers des lèvres de la jeune Lagerfelt. Ce qu'elle dit, c'était pire que tout ce que j'avais pu imaginer, tout ce que j'aurais pu penser possible. Pas même une seconde je n'avais pu croire qu'une telle idée serait passé dans la tête de mon blondinet de frère. Je retenais un cri d'effroi, ça servait à rien que j'alerte ainsi Jude de ma présence à l'hôpital.

« Jude a tenté de se… suicider. »

Aucun mot ne sortit de ma bouche. Qui avait-il de plus à ajouter ? J'étais pratiquement sûr qu'elle n'en savait pas plus, et que si c'était le cas, elle ne m'en dirait rien. Elle préfererait probablement que ce soit Jude qui nous en parle, entre frères et soeur, et puis c'était à savoir si lui désirait nous en parler. Les dernières semaines, je devais avouer que ma relation avec mon frère n'avait pas été des plus fructueuses, et je me sentais mal. On en avait rit à l'étang, mais j'avais vraiment été une soeur méchante, horrible et cruelle. J'attrapais de nouveau la main d'Enzo, et puis nous rentions ensemble dans cette chambre froide d'hôpital ou nous découvrions notre frère, étendu sur un lit d'hôpital, me donnant cette désastreuse impression d'un blessé sur son lit de mort. Je m'approchais, laissant toutefois Enzo prendre les devant. Il était sans-voix, et moi de même. Mon frère, mon grand frère, celui qui avait toujours été présent pour répondre à mes milles et un caprices.. il avait tenté de s'enlever la vie. Je ne réalisais pas, je ne réaliserais jamais. Je ne luttais même pas contre les larmes, les laissant tomber une à une sur mes joues, silencieuses. Je voyais que Jude avait fait de même, ses joues trempées, ses yeux rougis. D'ailleurs, c'était la seule chose qui semblait coloré dans son visage, lui qui était d'habitude si colorée.

« T'es blanc.. »

Et c'est lui qui parlait ? Et puis comment voulait-il qu'il soit ? Je n'arrivais pas à croire que l'on était vraiment là, et que la situation était réelle. J'avais envie que quelqu'un me pince, et que je me réveille de cet affreux cauchemar. Mon frère ne pouvait pas être suicidaire, lui qui aimait tellement la vie normalement. J'aurais pu répondre quelque chose du genre « Et toi c'est à peine si on te distingue de tes draps ! » Mais le moment était horriblement mal choisi et ce n'était pas à moi qu'il s'adressait. Je n'arrivais pas à croire que de tel "bad call" me venait encore en tête alors que mon frère semblait être dans un état critique. Je m'approchais de lui, les jours toujours innondés par les larmes qui ne cessaient de couler. À côté d'Enzo, je passais ma main sur la joue de Jude, avait de loger ma petite main dans la sienne. Sa main était complètement glacée, et j'espérais que ma main le réchaufferait un peu. J'avais besoin de le sentir contre moi, de le sentir en vie.

« Qu'est-ce qui s'est passé Jude.. Pourquoi ? J'ai besoin de toi, on a besoin de toi.. Je.. »

Je ne continuais pas ma phrase. J'allais éclater en sanglot, je le sentais. Je mettais ma main libre contre ma bouche, pour éviter tout son d'envahir l'espace de la pièce, et me penchais près de mon frère.

« Je t'aime Jude, je t'aime si fort mon grand frère.. »